De l’eau, de la slivovitz et du diesel

Une croisière sur le mythique Danube, à la découverte de Vienne, Budapest et Bratislava; des capitales empreintes d’un passé éclatant, façonnées par le passage des Habsbourg notamment. Mais une semaine à bord d’un véritable hôtel flottant, est-ce bien raisonnable pour le climat?

Lorsque Thurgau Travel m’a proposé de partir à bord de l’un de leurs navires, j’ai d’abord pensé refuser. Le concept des croisières est a priori bien éloigné des convictions de l’ATE et l’impact écologique me semblait trop important pour que l’idée éveille l’intérêt de nos lecteurs. J’ai cependant tout de même effectué quelques recherches avant de prendre une décision. C’est évident, un voyage en bateau n’est pas aussi écologique qu’une excursion en train. Mais les croisières fluviales, moins extravagantes que leurs grandes sœurs maritimes, constituent une alternative raisonnable aux déplacements aériens, l’avion restant le cancre en matière d’émissions.

Sur cette réflexion, j’ai consulté les offres de Thurgau Travel afin de me faire une idée sur les options pour un voyage ATE-compatible. L’entreprise familiale suisse-allemande propose des croisières fluviales dans le monde entier. Des bateaux à taille humaine sillonnent les eaux de 25 pays avec une offre très fournie. J’opte évidemment pour un voyage en Europe, dont le port de départ et d’arrivée soit accessible en bus ou en train depuis la Suisse. Ce sera le Danube et ses villes mythiques, de l’Allemagne à la Hongrie.

Embarquement en Allemagne

Le voyage commence à la gare de Zurich, d’où le bus part en direction du lac de Constance puis de la Bavière. Le bateau attend ses passagers dans la jolie ville de Passau. À bord, un équipage aux petits soins accueille les 140 voyageurs.

En toute fin de journée, nous larguons les amarres pour une nuit de navigation à travers l’Autriche. Le Danube est beau, mais pas aussi bleu que le laisse penser Strauss dans sa plus célèbre valse. Ses eaux calmes sont bordées de collines et de forêts dont elles reflètent le camaïeu de verts. Le bateau file silencieusement tandis que le soleil plonge derrière l’horizon.

Splendeurs d’Autriche

Nous atteignons Melk au petit matin. Première étape de notre voyage, la ville de Basse-Autriche est connue pour son abbaye bénédictine qui surplombe le Danube. Ses façades jaunes et blanches renferment plusieurs siècles d’histoire et de véritables joyaux d’architecture. On admire notamment la richesse de la grande église et la beauté de la bibliothèque.

Depuis le bateau, on contemple les paysages de la vallée de la Wachau. Les côteaux flanqués de vignes et d’abricotiers, les villages aux belles églises et la verdure, toujours omniprésente. Nous accostons à Vienne dans la soirée. La capitale autrichienne nous accueille le temps de profiter de son impressionnant décor et de son ambiance unique. La journée suivante nous permettra de nous aventurer dans son centre historique et ses majestueux palais où règne une fraîcheur bienvenue. Les rues sont animées et l’été accroche des sourires sur les visages.

Entre Buda et Pest

Au matin suivant, un rayon de soleil filtre par la fenêtre de la cabine. Sur la rive, le Parlement de Budapest nous accueille, imposant palais à l’image de la puissance de la Hongrie du début du 20e siècle. La capitale bouillonnante est née de la fusion de Buda et de Pest. Sur la rive occidentale, Buda est le quartier historique et aristocratique. On y trouve le château, le Bastion des pêcheurs et l’église Notre-Dame-de-l’Assomption de Budavár, dont le toit coloré rappelle la cathédrale Saint-Étienne de Vienne. Depuis les hauteurs, on profite d’un coup d’œil sur la ville et les eaux scintillantes du Danube.

A bord du tram jaune, on traverse le Danube pour rejoindre Pest, plus moderne, plus animée, plus commerciale. On visite le marché couvert où les spécialités locales – salami, paprika, fruits, fromage – se succèdent dans une explosion de couleurs et de saveurs. On s’éloigne de la rue piétonne aux enseignes familières pour parcourir les ruelles plus authentiques, jusqu’au pied de la cathédrale Saint-Étienne.

Il faudrait prolonger cette escale de quelques jours pour jouir des multiples facettes de Budapest, mais la suite du voyage nous emmène déjà vers la campagne hongroise et ses traditions.

Au cœur de la puszta

Le mot puszta signifie «néant» en hongrois et caractérise les paysages de steppe qui s’étendent dès la sortie de Budapest. Une végétation sauvage au cœur de laquelle fleurissent des champs de tournesols. Ces terres, foulées par tant de peuples par le passé, sont le berceau d’activités agricoles et folkloriques. Elles illustrent la fusion de l’orient et de l’occident. On se laisse emporter par la magie de la démonstration des csikós, les cavaliers hongrois en costume traditionnel. Ils dressent leurs chevaux avec des fouets qu’ils fabriquent eux-mêmes. Aux abords des fermes coiffées de toits de chaume, les troupeaux de bétails paissent dans un silence apaisant.

Slovenská republika

Notre bateau a entamé le trajet inverse et remonte vers le Coude du Danube, au nord de Budapest. La petite cité de Visegrád nous accueille le temps de traverser les ruines de son palais royal. Les plus courageux s’aventureront jusqu’au sommet de la colline, d’où la citadelle offre un superbe point de vue.

Nous quittons déjà la Hongrie pour découvrir Bratislava. La capitale slovaque dégage une atmosphère calme, loin de l’animation de Vienne ou de Budapest. Mais elle ne saurait pour autant nier l’influence du passage des Habsbourg, notamment sur son architecture. La visite débute par le château, situé sur les hauteurs de la ville. D’ici, on aperçoit la Hongrie et l’Autriche, toute proches. Au pied de la colline, la vieille ville et ses ruelles pavées au sol inégal invitent à la promenade. On admire la cathédrale Saint-Martin, la Porte Michel, surmontée d’un clocher à bulbe, et les façades pastel de la place principale. L’occasion de déguster une glace ou un verre de vin des Carpates slovaques.

Et retour!

De retour en Autriche, un dernier arrêt pluvieux nous permet de découvrir le joli village de Dürnstein. Un cortège de parapluie déambule dans ses étroites ruelles, le long des vignes et au pied de son église bleue. Le château médiéval veille sur la vallée de la Wachau. C’est ici que fut emprisonné Richard Cœur de Lion au 12e siècle. Une dernière nuit à bord nous permettra de rejoindre Passau, d’où nous repartirons vers la Suisse.

Réflexion

Durant cette semaine, nous avons parcouru un peu plus de mille kilomètres sur le Danube et le bateau a rejeté plusieurs dizaines de milliers de litres de diesel. Le chiffre est effrayant, mais avec quelques kilomètres en bus, c’est pratiquement le seul carburant utilisé pendant le séjour. Divisé par le nombre de passagers et mis en perspective avec le nombre de villes visitées, le bilan est nuancé. Mais cette réflexion se concentre sur le système de propulsion; il ne faut pas négliger l’impact de la vie à bord de cet hôtel flottant et le comportement des passagers.

Le séjour a été somptueux, rythmé de visites dépaysantes entre ville et campagne, tradition et innovation. Mais la réflexion sur notre façon de voyager et son impact sur la planète ne doit pas s’arrêter là. Pour cette raison, je vous proposerai un entretien avec la responsable de Thurgau Travel dans la prochaine édition du magazine ATE. L’occasion de lui demander quels engagements écologiques sont à l’agenda de l’entreprise. Qui sait, peut-être que l’avenir s’annonce plus vert. Paradoxalement, cela redonnerait certainement au Danube sa couleur bleue mythique.

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