L’art de vivre à la tyrolienne

Le Tyrol autrichien compte quelque 600 sommets de 3000 mètres. Impossible de vérifier en trois jours de voyage de presse si, comme le jure la publicité, chacun d’eux vaut une ascension. Il est très facile, en revanche, de comprendre pourquoi la région est si populaire.

«Nous emmenons la pluie avec nous. À bientôt dans le wagon 712 de l’EC transalpin.» Malheureusement, Daniel Predota, représentant du tourisme autrichien à Zurich, avait raison. À peine étions-nous arrivés au Achensee (930 m.) que les montagnes environnantes disparaissaient dans de lugubres nuages filandreux. Ce petit lac ressemble à un Lac de Garde miniature et alpin: au sud, un bassin arrondi aux eaux turquoises, puis, remontant vers le nord, un long bras entouré par le massif du Karwendel et celui de Rofan. Le lac est accessible sur tout son pourtour, et les enfants peuvent même s’amuser sur le sentier découverte sans voiture entre Maurach et Achenkirch. En plein été, le lac peut atteindre 20 degrés et plaît aux adeptes de voile et de surf, encouragés par les rafales venues de la Bavière toute proche. Au départ de Jenbach, l’une des dernières crémaillères à vapeur du monde crachote jusqu’au lac, d’où partent de jolies croisières.

Au lieu d’un vélo électrique, c’est un microbus qui nous emmène dans le Falzthurntal, situé dans le parc naturel du Karwendel, le plus important du pays. Les ruisseaux dévalent les flancs des montagnes, qu’ils strient de fils d’argent, tandis que nous nous initions à l’art du parfait Kaiserschmarrn («omelette de l’empereur», une sorte de crêpe soufflée) à la cabane de Falzthurn, avant d’admirer un peu plus tard un complexe hôtelier familial avec son tout nouveau – et paradisiaque –spa naturel au Gramaialm. La carte des mets, les chambres, l’atmosphère de la vallée: tout incite à y revenir rapidement. Que ce soit par en haut, après une randonnée à pied ou en mountainbike, ou par en bas, en ski de fond depuis Pertisau.

Une joyeuse hospitalité

Point fort thématique de notre expédition: l’art de la table. Le buffet du déjeuner de l’hôtel Rieser, incroyablement copieux, sera suivi de «Jausen» (divers en-cas) avant une dégustation de spécialités d’alcools locaux. À l’hôtel Alpin d’Achenkirch, ce qui sort de la cuisine d’Armin et Alexander Gründler relève d’une haute cuisine tyrolienne, fort raffinée. Et que le père et le fils commentent avec autant de fierté que de simplicité.

Mais d’où vient, se demande bientôt le touriste en vacances en Autriche, cette amabilité naturelle que l’on rencontre partout? Les recherches culturelles mentionnent le mélange des peuples propre à l’empire habsbourgeois qui aurait créé une mentalité où s’imposent des valeurs telles l’ouverture, le calme, le sens du compromis et celui de l’(auto)ironie. Ce savoir-vivre s’exprime notamment par des formules telles «Passt schon» («c’est bien ainsi» ou «pas de problème»), qui prennent des nuances différentes selon les régions mais qui signalent généralement que les choses sont bien comme elles sont.

Et c’est tout aussi aimablement que nous sommes accueillis sur la place de jeu des célébrités internationales, à Kitzbühel. Cette station de sport d’hiver de renommée mondiale a beau revendiquer son atmosphère tendance, elle est bien moins mondaine que nombre de ses concurrentes, avec ses rues piétonnes et son centre historique vieux de 700 ans. Simples ou sophistiqués, les restaurants y sont accueillants et de bonne qualité.

Cirque neigeux et gastronomie

Bien qu’il ne soit situé qu’à 800 mètres, le lieu de naissance de la coupe du monde de ski a la réputation de bénéficier d’un très bon enneigement. Grâce à son orientation nord-ouest, d’une part, grâce au recours massif à des auxiliaires, d’autre part. Le précieux or blanc récolté en fin de la saison est conservé dans des emballages compacts, abrités dans de gigantesques dépôts à neige, pour que le célèbre cirque redevienne blanc dès la mi-octobre

Les alentours de la «Gamsstadt» (la ville du chamois) sont eux aussi très agréables pour luger et randonner à ski ou en raquettes. À la saison chaude, pas moins de 1000 kilomètres de sentiers balisés invitent à la balade dans ces montagnes vertes, couvertes d’herbe jusqu’à plus de 2000 mètres, et qui rappellent un peu les paysages des Préalpes vaudoises et fribourgeoises.

Plutôt que d’admirer le lever du soleil au Kitzbüheler Horn et d’en admirer le jardin alpin, nous savourerons encore un excellent souper de clôture au restaurant Hallerwirt à Aurach, près de Kitzbühel. La jeune génération a repris les rênes de cette entreprise de tradition familiale. Parmi les produits qu’elle propose figure en particulier la viande de Pinzgauer, une espèce bovine adaptée à l’altitude et devenue plus rare. Notre hôte, Jürgen Stelzhammer, est une force de la nature au tempérament méridional, l’esprit politiquement affûté. Sa vision d’une économie alpine durable, il la combine – très autrichien, en cela – avec un certain pragmatisme lorsqu’il est question de canons à neige.

Quelques pas avec l’Empereur

Le groupe de voyageurs ramène la pluie avec lui, tandis que le soussigné part pour St. Johann, pour aborder le massif de l’Empereur (Wilder Kaiser), un imposant massif calcaire dressé derrière Kitzbühel. La couronne de sa majesté consiste en une enfilade de milliers de pics et de tours. Les deux premières étapes du Adlerweg (lire encadré) longent le pied du Wilder Kaiser, dans un paysage boisé et montagneux magnifiquement varié, au fil de chutes d’eau vaporeuses, par monts et par vaux, avant de descendre vers le charmant lac du Hintersteiner See. Le tronçon entre les cabanes de Gaudeamus et celle de Grutten – plus sympathiques l’une que l’autre – est la partie exigeante de la randonnée, dominée par un pierrier.

Que faire, quand le dernier bus pour Kufstein vient de partir, sur la route principale de la vallée? Se mettre en route, énergiquement. Mais avant même que j’ai eu le temps de lever le pouce, une voiture s’arrête, la deuxième seulement. Au volant, un jeune ébéniste bavard, qui rentre chez lui à Kufstein. Où il me dépose à l’hôtel, et ne veut rien savoir d’un dédommagement. «C’est bien ainsi», dit-il en souriant.

Informations utiles

Arrivée/Départ en train

  • Au départ de Zurich, 4 heures environ jusqu’à Jenbach, via Innsbruck. Accès au Achensee en quelque 20 minutes en bus. Depuis Kitzbühel, retour en 5 heures environ à Zurich, avec ou sans changement à Wörgl. www.achensee.com; www.kitzbuehel.com

Le Adlerweg

  • 33 étapes, 413 kilomètres et 31 000 mètres de dénivelé, indique la fiche signalétique du plus célèbre chemin de grande randonnée du Tyrol. 24 jours-étapes permettent d’explorer le paysage montagneux du nord Tyrol, tandis qu’un second itinéraire traverse la Glocknergruppe (massif du Glockner) et la VenedigerGruppe (aussi nommé les chaînons de Venise) au Tyrol oriental. Les exigences techniques et physiques sont variables. Remarque: le Rummlerhof, indiqué officiellement comme hébergement de départ, ne tient visiblement plus à accueillir les hôtes d’une nuit. www.tirol.at/adlerweg  (en allemand)


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